La Procédure Amiable dans le cadre des conventions de non double imposition
Dans le cadre du renforcement des garanties offertes au contribuable, la
Direction Générale des Impôts (DGI) a élaboré le présent document pour décrire l’application par le Maroc du mécanisme de règlement des différends prévu par les conventions de non double imposition (CNDI) conclues par le Maroc connu sous le nom de « procédure amiable » (PA). La pratique marocaine est inspirée des standards internationaux en la matière.
Le présent guide décrit les divers aspects relatifs à la procédure amiable (objet, demande d’introduction et traitement) afin d’assurer une résolution rapide, efficace et efficiente des différends fiscaux dans le cadre des CNDI.
I. Objet de la procédure amiable
La procédure amiable trouve son soubassement juridique dans une disposition spécifique prévue dans chacune des conventions de non double imposition conclues par le Maroc. Cette procédure s’applique lorsqu’une personne physique ou morale visée par une convention fiscale que le Maroc a conclue avec un autre Etat estime que des mesures prises à son égard entraînent ou entraîneront pour lui une imposition non conforme à ladite convention. Il peut, sans préjudice des recours prévus par la législation nationale, adresser une demande écrite et motivée de révision de cette imposition.
Aussi, cette procédure porte exclusivement sur les impôts expressément visés par la convention, et permet à la fois de résoudre les difficultés ou de lever les incertitudes liées à l’interprétation ou l’application de la convention.
Ainsi, toute personne physique ou morale ayant la qualité de résident fiscal au sens conventionnel peut soumettre sa demande se rapportant aux impôts visés par la convention fiscale dans un délai qui est généralement de trois ans suivant la première notification de la mesure qui entraine une imposition jugée non conforme aux dispositions de la convention. Toutefois, il Ya lieu de se référer à l’article relatif à la procédure amiable dans les CNDI pour s’assurer des délais d’ouverture de ladite procédure. Il est à noter que lorsque la CNDI ne prévoit pas de délai expresse, c’est le délai de 3 ans prévu par les standards internationaux qui s’applique.
La procédure amiable peut également être enclenchée par les autorités
compétentes des Etats ayant conclu avec le Maroc une CNDI afin de résoudre les problèmes relatifs à l’interprétation ou à l’application de la convention ou se concerter en vue d’éliminer les doubles impositions juridiques1 , les doubles impositions économiques2 ainsi que les doubles impositions qui surviennent dans les cas non prévus par la convention.
Le contribuable peut entamer une procédure amiable notamment dans les cas suivants :
● situations de double résidence ;
● qualification d’un type de revenu (situation dans laquelle deux
Etats interprètent différemment un même revenu) ;
● cas relatifs à un accord à l’issue d’un contrôle fiscal entraînant une
imposition contraire aux dispositions de la convention. Il est à souligner
à cet effet que l’objectif recherché dans ce cas est de garantir uniquement l’accès à la procédure amiable en donnant à l’autre Etat la possibilité de l’élimination de la double imposition. Ce droit d’accès ne doit pas être interprété comme incluant de manière implicite un engagement à revoir les termes de l’accord.
La procédure amiable est une procédure qui peut être actionnée en même
temps que les voies de recours du droit interne (recours administratifs et
judiciaires). Elle n’interrompt pas les procédures légales en vigueur (contrôle, contentieux,…) et ne suspend pas la mise en recouvrement des impositions.
Il est à noter que le Maroc ne prévoit pas de mécanisme d’arbitrage relatif à la procédure amiable dans ses conventions fiscales.
II. Introduction d’une procédure amiable
La présente partie a pour objet de clarifier les modalités et conditions d’accès à la procédure amiable ainsi que de déterminer la date d’ouverture de ladite procédure.
a. Accès à la procédure amiable :
L’accès à la procédure amiable est garanti pour tous les contribuables qui
remplissent les conditions de l’article relatif à la PA dans les conventions fiscales.
La demande d’ouverture de la procédure amiable doit être signée par le
contribuable, ou son mandataire (preuve du mandat à l’appui et établi
conformément aux dispositions légales en vigueur), qui atteste de la véracité et l’exactitude des faits présentés et s’engage à communiquer en temps voulu tout autre élément d’information ou document requis.
Le contribuable soumet, en principe, sa demande de procédure amiable dans l’Etat de sa résidence. Néanmoins, certaines conventions prévoient une disposition différente, d’où la nécessité de se référer auxdites conventions pour s’assurer du lieu de dépôt de la PA.
Lorsque de par les dispositions de la convention fiscale, le contribuable a la
possibilité de déposer la demande de procédure amiable au Maroc, il doit
l’adresser à l’autorité compétente marocaine à l’adresse suivante :
Direction de la Législation, des Etudes et de la Coopération
Internationale
Direction Générale des Impôts
Avenue Haj Ahmed Cherkaoui
Quartier Administratif Agdal
10090 Rabat
b. Demande d’ouverture de la procédure amiable :
Pour être recevable par l’autorité compétente marocaine, la demande
d’ouverture de la procédure amiable doit être déposée dans les délais prévus par l’article relatif à la procédure amiable dans les conventions de non double imposition. Ladite demande doit être motivée par les éléments suivants :
● l’identification du contribuable : nom, prénom, raison sociale, identifiant fiscal, adresse… ;
● les références de la convention fiscale en question et le numéro de l’article régissant la PA sous ladite convention ;
● les avis d’imposition et/ou la lettre de notification le cas échéant ;
● les impôts et les années concernés ;
● les arguments invoqués par le contribuable concernant les faits et circonstances entrainant ou pouvant entrainer une imposition non
conforme aux dispositions de la convention fiscale ;
● les copies de pièces justificatives appuyant sa position ;
● la copie du recours administratif ou judiciaire engagé par le contribuable le cas échéant.
● Tout autre document ou justificatif jugé nécessaire pour l’instruction de
la demande.
Après vérification de la recevabilité de la demande déposée au Maroc, l’autorité compétente marocaine informe l’autre autorité compétente, en principe, dans un délai de quatre semaines à compter de la réception de ladite demande. Cette notification doit contenir notamment les éléments suivants :
● l’identification du contribuable concerné ;
● les années d’imposition concernées ;
● description succincte du différend ;
● les coordonnées de l’agent en charge du traitement de la demande
de procédure amiable.
Par ailleurs, dans le cas où la demande ne comporte pas l’ensemble des
informations exigées, l’autorité compétente marocaine en avise le contribuable dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande de procédure amiable. Celui-ci est invité à fournir les pièces manquantes dans les meilleurs délais.
En l’absence de réponse du contribuable, l’autorité fiscale marocaine lui envoie une lettre de rappel afin de l’inviter à fournir les documents manquants. Le défaut de présentation desdites pièces entraîne la clôture de la procédure amiable.
Il convient de signaler que lorsque le recours à la procédure amiable est refusé par l’autorité compétente marocaine, elle en informe le contribuable et notifie l’autre autorité compétente en mentionnant les raisons ayant motivé ce rejet.
c. Date d’ouverture de la procédure amiable :
La détermination de la date d’ouverture de la PA revêt une grande importance, dans la mesure où elle constitue, pour les deux autorités compétentes, le point de départ pour le comptage des délais de résolution des différends. Il convient de signaler que l’autorité compétente marocaine adopte les normes internationales en la matière qui prévoient que la date d’ouverture de la procédure amiable doit être déterminée comme suit :
Cas général : Demande de PA complète
La date d’ouverture de la procédure amiable est la première des deux dates
suivantes :
▪ une semaine à compter de la date de la notification à l’autre Etat par
l’autorité compétente marocaine ; ou
▪ cinq semaines à compter de la réception par l’autorité compétente
marocaine de la demande d’ouverture de la procédure amiable du
contribuable.
Cas particulier : Demande de PA incomplète
Lorsque l’autorité compétente marocaine reçoit une demande d’ouverture de procédure amiable qui ne comporte pas l’ensemble des informations et
documents nécessaires, elle en avise le contribuable dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de ladite demande. Ainsi, la date d’ouverture est la dernière des deux dates suivantes :
▪ date d’ouverture de la PA dans le cas général telle que déterminée ci-
dessus ; ou
▪ date à laquelle les informations et/ou les documents manquants seront
reçus.
L’autorité compétente marocaine informe l’autorité compétente de l’autre Etat et le contribuable de la date d’ouverture de sa demande.
III. Traitement de la procédure amiable
La procédure amiable peut être traitée unilatéralement ou bilatéralement. La présente partie vise, par conséquent, à clarifier les modalités de chaque
traitement.
a. Traitement unilatéral :
Dès lors que :
● l’imposition émise à la charge du contribuable par les services fiscaux
n’est pas conforme à la convention ; et
● l’impôt dû relève entièrement des compétences des autorités fiscales
marocaines, l’impôt ainsi établi, sera dégrevé, en totalité ou en partie par le service concerné par l’imposition. La procédure amiable est par conséquent clôturée.
b. Traitement bilatéral :
Dans le cas où l’autorité compétente marocaine n’est pas en mesure de trouver une solution de façon unilatérale, la procédure amiable est traitée
bilatéralement.
L’autorité compétente marocaine envoie en principe dans un délai de quatre mois après ouverture de la procédure sa note de position à l’autorité
compétente de l’autre Etat. Toutefois, si cette procédure a été engagée dans
l’autre pays, l’autorité compétente marocaine s’efforce de répondre à la
première note de position dans un délai de six mois.
L’autorité compétente marocaine s’efforcera, à travers un échange de notes de positions avec l’autorité compétente de l’autre Etat, à résoudre le différend objet de la procédure amiable. Le délai moyen de traitement des procédures amiables est de 24 mois à compter de la date d’ouverture. Au cours de cette période, les autorités compétentes des deux Etats peuvent se rencontrer dans le cadre d’une commission mixte afin de se concerter pour parvenir à un accord.
Le contribuable n’intervient pas lors du processus de règlement du différend où seules les deux autorités compétentes sont habilitées à trouver une solution à ce litige. Toutefois, le contribuable pourra être amené à collaborer pour fournir plus de détails.
IV. Clôture de la Procédure amiable
A l’issue de la procédure amiable, plusieurs cas peuvent se présenter dont notamment :
● allègement consenti de façon unilatérale.
● l’accord entre les deux autorités compétentes pour éliminer
entièrement ou partiellement la double imposition.
● l’accord entre les deux autorités compétentes sur l’absence
d’imposition non conforme aux dispositions de la convention.
● l’accord sur le désaccord.
La date de clôture de la procédure amiable est :
● la date à laquelle l’autorité compétente informe le contribuable des
résultats de sa demande de procédure amiable ; ou
● la date à laquelle le contribuable retire sa demande de procédure
amiable.
Lorsque les autorités compétentes sont parvenues à un accord, le
contribuable en est informé. Celui-ci notifie son acceptation ou son refus du
résultat de la procédure amiable dans les meilleurs délais.
En cas d’acceptation, il devra se désister de toute instance engagée en ce qui
concerne les points réglés par la procédure amiable.
L’autorité compétente marocaine invite le service d’assiette dont dépend le
contribuable afin de procéder à la mise en œuvre de l’accord obtenu, dans
les meilleurs délais.
Dans le cas où la convention entre les deux pays ne prévoit pas l’application
de l’accord quel que soit le délai prévu par le droit interne, l’autorité
compétente marocaine prend l’attache de l’autorité compétente de l’autre
Etat afin d’accélérer le processus d’implémentation dudit accord.
Il convient de préciser que les pénalités et majorations directement liées aux impôts objet du différend sont dégrevées proportionnellement au montant de l’impôt déchargé prévu par ledit accord.